Peter Kossen ne craint pas de critiquer l’industrie allemande de la viande. Ce prêtre catholique de 52 ans au crâne presque rasé dénonce depuis des années les mauvaises conditions de travail que subissent les travailleurs venus d’Europe de l’Est.
Avec l’explosion du nombre de cas de Covid-19 dans plusieurs abattoirs, sa parole est devenue encore plus audible. Dernier scandale en date, cette semaine, le fait que plus de 1 555 salariés du géant Tönnies ont été testés positifs au coronavirus sur les 7 000 qui travaillent dans la plus grande usine à viande d’Allemagne, à Gütersloh.
« Des structures criminelles et mafieuses »
« Le cas de Tönnies est loin d’être unique » résume ce père catholique qui officie dans la paroisse de Lengerich, près de Münster. « Autrefois, les métiers de la boucherie étaient bien payés. Aujourd’hui, la main-d’œuvre locale est remplacée par des salariés bon marché, roumains et bulgares, souvent exploités », accuse ce prêtre qui a créé une association pour conseiller les migrants.
« Nous avons affaire à des structures criminelles et mafieuses », avance-t-il. « Travailler 12 heures par jour, 6 jours sur 7 est illégal en Allemagne. Or le système de sous traitance à des entreprises étrangères, la délégation des responsabilités de la part des employeurs allemands et le fait que personne n’ose se plaindre font perdurer ce système », assure-t-il en dénonçant aussi l’insalubrité des logements collectifs. « Certains louent un matelas qu’ils occupent à tour de rôle. Leur situation sanitaire était déjà précaire avant l’épidémie. Ils sont vulnérables face au nouveau virus », dénonce ce prélat.
Mesure de quarantaine à la veille des vacances
Pour Peter Kossen, les responsabilités sont multiples. « La politique est censée réguler et de contrôler le secteur. Elle a échoué. La société aussi a une part de responsabilité lorsqu’elle feint d’ignorer. Les Roumains et Bulgares du secteur de la viande vivent dans un monde parallèle », s’insurge-t-il.
L’opinion publique locale semble toutefois avoir enclenché une prise de conscience. Avec le scandale chez Tönnies, les 600 000 habitants des communes de Gütersloh et Warendorf ont de nouveau été placées en confinement, le 23 juin. La colère est grande, d’autant que les vacances scolaires débutent ce samedi 27 juin, et que certains Länder ont décrété une quarantaine, voire une interdiction de séjour, pour les touristes en provenance de ces zones.
Face à la gravité de la situation, le gouvernement fédéral veut interdire les contrats de sous-traitance dans le secteur de la viande. « C’est un premier pas, important et nécessaire mais insuffisant », juge Peter Kossen. Certains proposent de réduire la taille des usines de découpe et de transformation de viande, d’autres prônent une gestion étatique des abattoirs.
Les autorités, elles, multiplient les réunions de crises pour éviter que ces foyers localisés n’engendrent une deuxième vague d’épidémie dans l’ensemble du pays.
June 28, 2020 at 04:35PM
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Peter Kossen, un prêtre pour défendre les salariés étrangers du secteur de la viande - Journal La Croix
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